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Après chaque déconfinement, les français s’empressent de retrouver la liberté de circuler. Les camping-cars et vans aménagés sont de sortie, les loueurs sont pris d’assaut, chacun veut profiter de ces précieux moments d’évasion. Si cet engouement profite au secteur des véhicules de loisirs et au tourisme de proximité, certaines communes en subissent des conséquences chaotiques.

Saturation des lieux touristiques et sites naturels, stationnements anarchiques, camping sauvage et incivilités, le cocktail a tout pour être explosif. Certains sites en ont fait l’amère expérience l’été dernier, et de nombreux maires ont été contraint de serrer la vis pour éviter un nouvel épisode estival sous tension.

Si le camping-car est synonyme de liberté, la perspective d’étapes en pleine nature ou en bordure de mer peut s’avérer plus complexe que prévu. Il faut avant tout s’assurer que l’on peut stationner et camper sur des lieux autorisés.

Le camping-car victime de son succès

Dès le week-end de l’ascension 2020, et la fameuse règle des 100 km, les français avaient unanimement consacré le camping-car, soutenu par une active campagne de pub. Autonomes en transport et en hébergement, les camping-caristes pouvaient échapper à la foule dans leur bulle sanitaire sur quatre roues. Résultat, les loueurs voyaient leurs réservations augmenter de 50%, et les plateformes entre particuliers leur nombre d’inscriptions doubler.

Mais très vite, de la côte d’opale au lac de Serre-Ponçon en passant par les hauteurs du Mont Lozère, on a vu des  situations de concentrations se faire jour, comme dans ce petit village de Normandie, à Saint-Céneri-le-Gérei, dont la centaine d’âmes a vu débarquer 70 camping-cars en un week-end ! Le phénomène ne s’est pas limité à ce premier déconfinement, et dès le mois de juin, le camping-car, cette « vedette inattendue de l’été » en est aussi devenu le trouble-fête .

Des gendarmes en renfort

La Bretagne, première destination des camping-caristes et régulièrement soumise à une forte pression touristique estivale, n’a pas échappé aux phénomènes de camping sauvage et de stationnement anarchique. L’été dernier, les gendarmes sont intervenus sur la baie des Trépassés pour calmer les esprits et faire respecter la réglementation du site naturel de la pointe du Raz.

« Nous ne refusons pas les camping-cars mais certaines personnes, “éprises de libertés”, s’installent dans les espaces sensibles sans respecter les consignes de protection », constatent les municipalités de Cléden et Plogoff, qui ont reconduit la présence de réservistes cet été.

Vidanges de cassettes WC dans le lac

Même son de cloche en montagne. Niché dans le massif des Hautes-Pyrénées, le lac d’Estaing, somptueux site naturel protégé, n’a pas été épargné par l’afflux massif de touristes. Mais face à la multiplication d’actes d’incivilités : cassettes des WC vidées dans le lac, vidanges et ordures sauvages, feux de camps; la Maire Marie-Luce Komeza a été contrainte de durcir la réglementation et de faire intervenir la gendarmerie pour verbaliser.

« C’est une vallée pastorale préservée, avec une flore et une faune unique. Le site autour du lac est interdit au camping sauvage, pourtant de plus en plus de campeurs s’installent et se croient tout permis » déplore l’édile. « On pouvait fermer les yeux pour 1 ou 2 personnes, mais aujourd’hui voir jusqu’à 80 camping-cars la nuit, des comportements irrespectueux voire agressifs, ça n’est plus tolérable » renchérit-elle. « Ce n’est pas lié au seul déconfinement, ni exclusif aux camping-cars, le phénomène s’amplifie depuis quelques années ».

La liberté… de polluer

Une situation d’autant plus incompréhensible que le site dispose de campings à proximité et d’une aire d’accueil dans le village voisin. Alors la question se pose, comment sensibiliser un public en quête de nature au respect de cette même nature ? Pour Madame la Maire : « La prévention ne suffit plus, des amendes pour atteinte à l’environnement de 1500 € ont calmé les ardeurs. Une très grande majorité de camping-caristes nous soutiennent dans notre démarche de préservation et de sanction ».

« Un camping-car reste un véhicule tant qu’il ne dispose pas d’emplacements autorisés pour être utilisé en mode camping »

« La facilité de louer un camping-car ne doit pas faire ignorer les règles à quelques-uns » poursuit-elle, « ce sont les mêmes qui rétorquent aux gendarmes “on est libre de faire ce qu’on veut”. Non on n’est pas libre de polluer ni d’occuper un site préservé. Un camping-car reste un véhicule tant qu’il ne dispose pas d’emplacements autorisés pour être utilisé en mode camping ». Et la Maire de conclure : « On ne peut pas, et on ne veut pas, rendre un site naturel payant, les visiteurs ne sont pas des vaches à lait. À condition de la respecter, la montagne appartient à tout le monde ».

Un phénomène à la marge

On peut légitimement s’interroger sur les raisons de telles extrémités. Sur-fréquentations des sites ? Structures d’accueils inadaptées ? Camping-caristes irrespectueux ? Manque d’informations et de pédagogie ? Pour le syndicat des véhicules de loisirs (UNI VDL) le phénomène de saturation estivale n’est pas nouveau « Certes l’été dernier il y a eu des nouveaux utilisateurs conjointement aux habitués qui n’ont pas pu partir à l’étranger. Mais chaque année aux beaux jours les camping-cars sont de sorties, et certains territoires sont régulièrement en tension en haute saison », modère Hervé Gautier, directeur des opérations de l’UNI VDL.

Pour une pratique du camping-car responsable et citoyenne, le syndicat des entreprises du véhicule de loisirs (UNI VDL) invite les voyageurs à adopter la charte du camping-cariste citoyen.

« Nous accompagnons les collectivités pour développer ce mode de loisirs, les communes sont volontaires pour offrir le meilleur accès possible aux camping-cars, elles n’hésitent pas à investir pour augmenter leurs capacités d’accueil. » détaille Hervé Gautier. « L’essor de la location et l’arrivée de nouveaux utilisateurs est aussi une bonne chose. Mais cela doit passer par une période d’apprentissage, à cette fin nous avons édité un guide des bonnes pratiques et une charte de respect de règles élémentaires ».

Gageons que les professionnels soient entendus par tous les utilisateurs de camping-cars, fourgons et vans aménagés. Aux vues des problèmes rencontrés pas certains maires, pas sûr qu’ils soient tous réellement informés de leurs obligations. A savoir : le stationnement, le camping et les vidanges, ne peuvent être effectués que sur les lieux et emplacements autorisés. Il y a peut-être aussi un manque de savoir-vivre, mais ça c’est une autre histoire…

Les applis en question ?

Avec plus de 6 millions de téléchargements, Park4Night est devenue l’application incontournable pour les voyageurs en quête de bivouacs, 180.000 lieux y sont recensés. Basée sur le principe collaboratif de partage des informations, ses utilisateurs partagent avis et photos. Mais ce style d’appli ne favorise-elle pas le “sur-tourisme” ?

Le concepteur de Park4Night, Bertrand Fichter, s’en défend « L’appli ne se limite pas aux seules étapes natures, elle localise les campings, aires, parkings, services, activités… De plus, de rigoureuses vérifications sont menées par notre équipe de 12 modérateurs. Nous collaborons étroitement avec les communes et les parcs nationaux avant de valider un stationnement. Enfin les commentaires et photos qui témoigneraient de comportements inappropriés sont supprimés : feu de camp, déballage sur la voie publique, stationnement nocturne, lorsqu’ils sont interdits par arrêté municipal ».

Park4Night met en exergue sur son site et sur son appli, une charte du voyageur responsable en camping-car, fourgon aménagé et van, des règles de bon sens pour préserver la nature et les coins sympas.

Voir les articles indispensables sur le stationnement en camping-car :

Stationner ou camper, que dit la loi ?

Quelles sont les solutions pour faire étape ?

8 applications pour découvrir la France en camping-car

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